• La ligne noire

     

    La ligne noire




    02 mars 1892, Singapour, un mouchoir dans la poche.

    Sur les égouts fumants de la 5ème avenue, on entendait le vent gronder comme une foule de soldats mécontents. On regardait parfois le regard des passants fuir comme une balle perdue, et puis de temps à autre le sourire des coins noirs s’offrir à l’inconnu. Il fut un temps l’ailleurs lorsqu’aux bouts des lèvres d’un monde l’homme courait après ses lignes tandis que d’autres, peintres, traçaient, de peur de voir l’horizon friser, de peur de voir l’humanité se perdre aux femmes des bas-côtés, sur une bordure de l’univers. Sur le trottoir gauche des rues, des hommes se rassemblaient pour contempler la nuit. On y voyait l’aveugle prenant racine et qui, du bout d’une branche, volait la nuit d’une robe d’ombre pour assouvir sa soif d’infini. On y voyait de beaux hommes et d’autres moins aidés qui, tous unis, tapaient le sol du pied pour y créer la vie, qu’importe sa féminité. 02 mars 1892, Singapour sur une grande ligne noire voyait le ciel tomber, asphalte, sous la droiture de l’horizon et l’homme, sur un cil d’inconscience fermait ses yeux, ému, comme un mouchoir dans la poche.


    14 avril 1896, sur un bouton de prose.

    Il est 20 heures et le deuxième district s’allonge sur le port. Sur les embarcadères, lorsque les jeunes hommes en jaune et bleu s’adonnent aux vagues, on y voit de grands gens, de petites femmes et des mouettes à longues dents, pour morceler ces robes que l’esprit perd dignement en mer. Vous y verrez des dames portant le poids du monde, vous y verrez des hommes, porter le poids des larmes, et les navires, valser sur les courants du monde. 14 avril 1896, il est 20 heures et le deuxième district s’allonge comme une plage de sable, et les marins s’en vont, silencieux, sur une boîte à paroles lorsque le cœur d’un homme laisse l’ancre sur bouton de prose. La ligne noire, l’homme est un phare perdu sur l'horizon, se clamant roi porteur d'espoir... sur le mauvais versant de la raison.

     

     



    © Damien Corbet -Tous droits réservés.


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