• En espérant que cette ébauche puisse plaire. Par avance, merci pour votre lecture et, éventuellement, vos retours. Bonne lecture.

     

     

    L’art est un proxénète, et j’en suis la putain.

     

    Nelson Spark

     

     

    L'art est un proxénète et j'en suis la putain. [Roman en cours]

     

    Incubation :

    Savons-nous réellement où nous allons...

    Au début, je m'étais dit que tout irait bien, qu'après tout, cela continuerait  quoi qu'on en pense, mais l'homme ne fait que suivre l'homme à sa plus belle et fausse image en croyant que le monde la suit tout autant...

     

    Quelques personnes aux balcons, d’autres encore entassées sur une des nombreuses places d’exécutions publiques, attendant parmi les ragots des uns et des autres. Devant moi se tenait un petit monsieur chauve qui cachait soigneusement sa tête lustrée sous une vieille casquette verte, qui, souriant bêtement sous sa moustache fraîchement rasée, tapait dans ses mains comme tout le monde ici, enfin, sauf moi et maman bien entendu. De temps à autres, je dépoussiérais ma sèche sur la veste d’un homme, un truc chic, dernier cri, du Gatchi, y parait. Du coup, maman me faisait souvent remarquer d’un signe de la main stricte mais léger, de me tenir comme il se doit, en me répétant doucement à l’oreille lorsqu’elle jugeait ma tenue indécente aux yeux des autres, que ce jour représentait la paix pour des millions de français ici. Dans le fond, j’en avais pas grand-chose à faire de me tenue, et encore moins de ce que les gens pouvaient en penser, puis, je suis plus un gamin, à vingt ans tout de même, il y en a qui pissent sur les murs en criant «vive la France», la liberté, la fraternité, mais dans le fond, c’est de la connerie tout ça. Maman se rapprocha de moi, la foule épaississait, et dans un bruit strident, comme du fer qu'on frotterait contre un tableau, les gens se mirent à danser. On venait d'annoncer l'abolition de la peine de mort en France. Alors, tous unis, ils criaient à tue-tête « 1981, c'est un peuple qui renaît ! ». Maman se pencha alors vers moi en me disant :   « Dansons avec eux, même si ce n'est que pour faire bonne image, dansons. »

    Je la regarda aussitôt d'un air dérangé et sévères puis lui répondis :

    « Maman, tu sais que je hais tous ces gens, ces grosses bourgeoises aux airs niais, ces potiches, Paris et ses prostituées, bien qu'elles soient plus productives que nos politiques. Certains viendront nous dire  qu'c'est beau et d'autres que c'est pas bien, tout ça sur le dos de ceux qui plaideront que c'est de l'art d'voir une femme nue danser. D'ailleurs, l'art c'est de la foutaise, avec tous ces snobes qui se disent artistes. Ça fait deux ou trois œuvres pour que quelques personnes un tant soit peu plus avérées d'esprit viennent dire «C'est magnifique, oui», alors que dans le fond c'est juste une autre façon de voir le monde, de le vivre. Puis ces dits « artistes » sont justes des fruits tombés trop tôt d'un arbre de peur de suivre un tronc commun – et c'est peut-être la seule raison pour laquelle je leur porte un intérêt, même le plus sadique. De toute manière, dans le fond, s'ont pas plus mal que ça, ces illuminés, ça donne matière à jacasser.

    Aussitôt cette que réponse argumentée de mots qui dérangent fut dite, maman me prit par le plis du blouson que mon père m'avait laissé en héritage, et me dit : 

    - J'vais boire, j'en ai marre de tes âneries, puis je pige rien à tout ton charabias.

    C'est vrai que maman n'était pas une femme intelligente, d'ailleurs, la seule chose qui aurait pu le laisser croire était sa tendance à s'enrober d'habits affreux comme ceux que portent ces crétins de la haute société. D'ailleurs, elle dit souvent qu'auprès d'une femme, un homme ne cherche en aucun cas à savoir ce qu'elle a dans le crâne, mais juste à zieuter ce qu'elle peut avoir d'attirant. M'enfin, autant se le dire, avec ses 130 livres y'a pas grand monde qui lui porte attention de manière intéressée, ce serait plutôt la mouche au beau milieu d'une salle silencieuse qu'on regarde lorsqu'on a rien d'autres à faire et que l'on se cherche une excuse à ne pas être assez studieux pour écouter les autres.

    Quoi qu'il en soit, le sum 37'bar était un coin sympa où John - un homme fort agréable et très cultivé question blasphèmes en tous genres- passait son temps. La première fois que je l'ai vu c'était il y a deux ans lors d'une soirée comme une autre ou plein de gens dépourvus de sens face à la réalité viennent se prendre pour des légumes et faire avec leur langue des bruits bizarre en estimant qu'c'est du classique. John, lui, il était clean ou presque - mais ça ne change pas grand chose  -, et criait gaiement et gaiement " L'commnise, l'comu...sime", suivis de mots trop pointus pour que je les retiennent tous. Il avait aussi flashé sur maman, et presque un peu tout le monde, entre autres choses.  Mais la raison la plus frappante pour expliquer mon intérêt  pour cet endroit était tout simplement le fait d'éprouver pour ces gens une pitié sans pareille – au point qu'elle soit comparable à l'orgasme- et de trouver néanmoins un quelconque aspect ludique en tout ça. 

    Moi, la seule chose qui me venait en tête, c'était «asile de fous» comme un refrain, persuadé que maman était un des cas les plus intéressants. Elle avait pour habitude de se cogner la tête contre le chandelier qui élance le bar, alors John lui, il voyait en elle une propagandiste du pape après quelques verres trop vite vidés ensemble.

    Maman s'approcha alors de moi, me sortant quelques pièces de monnaies qui traînaient au fond de sa poche, accompagnées d'un billet pour la fête dansante qui aurait lieu mardi et me dit :

    - Tu veux quoi, qu'est-ce qui te ferait plaisir, ce soir on roule sur la fortune, j'ai revendu quelques vieilleries qui appartenaient à ton père.

    - Tu rigoles j'espère ? Tu sais bien que j'y tiens à ces «vieilleries», comme tu dis. Qui plus est, si cet argent que tu dépenses au dépend des sentiments que j'éprouve pour mon regretté père ne t'insuffle aucun remord, je n'en veux pas.

    - M'sieur ! Deux bières s'il vous plait, et un scotch, aussi.

    - Tu m'as entendu ?

    - T'en fais pas va, il en reste encore pour quelques liasses, pis t'as pas à t'en faire, j'ai gardé quelques cartons qui te sont destinés. Vas donc t'asseoir plus loin, si ma bonté t'exaspère. Et profite.

    Une fois assis quelques tables  plus loin de celle de mon imposante mère, une dame plutôt mignonne, mais trop orgueilleuse par son attitude pour y prétendre verbalement, s'approcha et d'une voix préoccupée s'adressa à moi : 

    - J'vous sert quoi M'sieur ?

    - C'est déjà commandé.

    - J'vois que vous avez un billet pour la fête, vous dansez ? Dit-elle d'un ton rabaissant.

    - Mon poids vous gêne ?

    - Votre poids ?

    - Oui, mon poids. Vous avez quelque chose contre les gens forts ? J'fais peut-être 150 livres, mais les femmes ne se sont jamais plaintes.

    - Ben, non M'sieur.

    - C'est bien.

    Elle repartit alors aussi vite qu'elle fut venue près du comptoir ou se tenait sa patronne, une femme qui ne serait au goût d'aucun homme, aigrie et noire. Elles bavardèrent quelques instants, puis lorsque son imposant tronc daigna à se lever, elle vint me voir accompagner de ma bière, et la posa d'un geste franc et brusque sur la table :

    - Alors comme ça vous cherchez du tort à Mam'zelle Céline ? Non mais ho ! Où va le monde, je suis bien gentille de recevoir des gens comme vous et votre mère dans mon établissement alors qu'ça nous fait pas bonne image. Maintenant, le minimum pour des gras comme vous, c'est de boire son verre, de rester tranquille et de respecter celles qui vous servent. Non mais !

    - Tsss. Les proprios des bars sont tous les mêmes aujourd'hui, ça a bien changé s't'enseigne. Ça vend de l'alcool, et ça se croit Dieu. Non mais ! Comme vous dite. Il a fallu qu'un homme dise que l'alcool fut créé pour les hommes fous du bel âge, pour que des femmes telles que vous se prennent pour des bonhommes.

    - Si vous continuez comme ça, c'est la porte !

    - Et bien, la porte, je la connais. Et je m'en vais de ce pas. Gardez donc votre pisse pour d'autres, le minimum ici, c'est de vendre de la bière. 15 francs pour ça, sa se dénoncerait presque. Allez, viens maman, on s'en va.

    - Mais la bière est bonne, laisse-moi la finir.

    - Ce n'est pas le cas de la propriétaire, on y va !

    - Bon, j'appelle la police.

    - Ce n'est pas la peine. Vous entendrez parler de moi.

    Maman sortie en ayant encore son vers à la main et, comme si de rien était – ou du moins, comme si elle semblait avoir suivie une quelconque conversation qui aurait pu être celle de la patronne et de moi-même- elle répliqua :

    - En effet ! Et mon fils n'est pas de gauche, mais il se soigne !

    Non peu fière d'avoir répliquée avec une telle sûreté – ou dirons-nous sottise-, elle entama un long mouvement digne du plus grand ballet saoul pour ouvrir la porte de notre voiture. Enfin voiture, je ne sais pas si cette vieille carcasse en ferraille mériterait ce titre. Une fois assise, elle se désista finalement à conduire et décida de me traîner autre pars, en expliquant que la charge était bien trop importante pour ce vieux véhicule. 

    - Insinuerais-tu que je suis fort en graisse, maman ?

    - Bien-sûr que non, mon chéri, tu sais bien que nous avons l'habitude de voyager plutôt lourd généralement, avec tous ces bagages. Dit-elle tout en se touchant le ventre comme une femme enceinte.

    Au moment où maman décida enfin de se diriger vers un bar qu'elle montrait du doigt avec beaucoup d'entrain, John vint nous voire en nous priant de l'écouter. Bien entendu, maman, comme toute bonne femme de bon cœur qui se respecte accepta avec un sourire digne du plus beau des ignares. John étala toute ses connaissances afin de faire bonne image auprès de maman -en sachant que cela ne le mènerait à rien, parler de saoul à saoul, c'est comme se parler seul-, et expliqua les principes du rapport mère-enfant – entre autre. Maman tilta alors et se mit en tête de rattraper toutes nos années perdues. En vain, puisqu'elle se coucha quelques instants après.

    Quelques minutes plus tard, un gendarme qui passait faire sa ronde s'arrêta quelques instants en dévisageant John puis  lança d'une voix grasse et sale :

    Hé, vous deux, z'avez pas d'autres choses à faire que d'ennuyer les bonnes gens avec vos odeurs de chair saoule ? Faudrait quand même nous montrez un peu de mérite, à nous, à l'ordre, pour vous acceptez là.  Puis c'est quoi ça, HEIN ?!

    - Ça, comme vous dites, c'est ma mère, et elle vous salue, malgré l'incapacité qu'elle émet à le faire. Dis-je d'un ton taquin.

    - Dis-moi toi, le gros, c'est pas que tu m'énerves, mais faudrait que tu te montres respectueux envers moi, hein ! J'en ai mis pour bien moins au trou tu sais !

    - Wowowowowoh ! Hé ho ! Doucement, y'a pas mort d'homme m'sieur l'agent, heinnnnnn. Dit John en étant à moitié conscient de ce qui se passait.

    - Non mais pour qui vous prenez-vous, et toi là, le gros, t'sais que t'as la tête du communiste, hein ! Tu vas venir gentiment au poste nous en dire un peu plus sur toi.

    - Non mais laissez-le ce gosse, vous l'enlèveriez devant les yeux de sa mère, et vous vous dites flic c'est ça ?

     

    Le gendarme finit alors par m'emmener au poste et me fit m'asseoir dans une pièce sombre et sinistre ou un homme mal rasé, vêtu d'une chemise noire et d'un jean presque neuf, se mit à me poser diverses questions :

    - Nom, prénom, lieu de naissance. Vous êtes communiste, parait-il ?

    - J'ai pas vraiment de nom monsieur, à vrai dire on me nomme comme on veut. Puis communiste, ce serait nouveau ça. Bon, je l'admets, j'aime pas l'espèce humaine, et si elle pouvait disparaître, tout le monde s'en tirerait à bon compte. Mais ça ne fait pas de moi un communiste.

    - En effet, un nazie, un nazie, monsieur !

    - Ha ! Un nazie, et bien dites-moi, vous qui semblez si sage de jugement, citez-moi les actes qui vous mènent à cette conclusion si bien fondée ?

    - Hum.

    - Vous savez, vous n'avez rien. D'ailleurs, c'est comme ça pour tout. Le violeur lui vous dira : Mon sexe est la raison lorsque mon cerveau éjacule des pensées qui n'a-donnent que la mort. Et suite à cela,  vous l'emprisonnerez sans chercher à comprendre le sens même de ses dires. Alors oui, monsieur, je suis coupable d'être génie, et si votre éloquence est aussi marquée que votre pouvoir à n'avoir aucun répondant, relâchez-moi, évitons-nous une perte de temps.

    - Du temps, vous en aurez, croyez-moi !

     

    [A suivre]

     

    © Damien Corbet - L'art est un proxénète et j'en suis la putain. Tous droits réservés. 


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    [ Revue Empreintes ]
     
     
     
    « Empreintes » est un chemin collectif, l'orée d'une écriture, les pieds qui le forgent marquent ici leur vigueur et tracent la route de leur jeunesse. Suivre, poursuivre. Atteindre des sentiers nouveaux, sortir de la forêt, mesurer notre peau à la chaleur des regards, à leur sécheresse, et parfois, leur froideur. Voilà notre ambition.

    Pour la plupart sans expérience éditoriale, sans expérience tout court, nous venons à vous presque nus, sans nom, quelques syllabes dans les poches, tout au plus quelques vers. Je conviens qu'il est audacieux d'afficher ainsi sa nudité, son inexpérience, certains pourrons même rire de notre audace ; mais dans un monde où la littérature est devenu business, où les jeunes auteurs sont boudés par l'édition (nos noms inconnus ne font pas encore recette), où la poésie est souvent moquée, au mieux, murmurée, une revue internet nous a semblé la meilleure option pour libérer nos voix du silence assourdissant. Les amplifier. Les diffuser.

    Certes, internet est un océan que remue la cacophonie, et perdus en son sein nous sommes tels ces naufragés qui lancent une bouteille à la mer. Et pourquoi pas ? Vous êtes ce navire qui nous délivrera du néant. Et pour cela, vous méritez nos plus sincères remerciements.

    En dépit de notre inexpérience en la matière, Empreintes se veut un projet sérieux, littéraire, découvreur de talents. Sans carcan que la qualité, nous porterons toujours notre exigence au plus haut, et jeunesse n'excusera jamais indécence littéraire. Une cohérence dans le choix des textes reste encore à trouver. La poésie servira de dénominateur commun, la poésie non comme genre mais comme rapport au monde. Elle nous fondra dans son moule indomptable, changeant, moqueur des formes et des règles du réel. Nous croyons que le monde est à déshabiller, à l'infini.

    Ces premières traces, ces premières mains qu'on appose contre la paroi de vos cœurs, nous les voulons tendres mais sans faiblesse. Prenez les, tournez les, vous y trouverez peut être l'éclat de votre propre jeunesse, une clé, un talent.

    Bien cordialement,
     
     
    N°1 de la Revue des jeunes auteurs  :
     
     
     
     

    Pour toute proposition de texte(s) pour les prochaines parutions de cette revue, veuillez, s'il vous plait, joindre vos textes à l'adresse suivante : damienlechiquou@msn.com
    en pensant bien entendu à nous faire par d'un court récit sur votre personne afin d'éviter tout vol de texte, etc.
     
     
     
     

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  • Psychose

     

    ici… Seul Dieu n'a besoin de rien. Ni de nous, d'autant moins de lui-même.

     

    C’était comme un film qu’on regrette d’avoir tourné, haché de voix éparses. Il y avait des visages sans unité de sens, des pas sans cohérences, sans ondes musicales, où la chair triste et parfaite s’effondre pour se rendre à la vie.

    On voyait parader le corps inerte de vieux hommes où vient chanter le miracle des mots, où vient naître en leur cœur l’impossible, et nul n’approche de quiconque sauf par la pensée.

    Monde, le ciel telle une folie ouverte aux yeux et délires baroques, qui, le soir venu tombe cannibale telle une célébration érotique.

     

     Les gens n’étaient qu’un poème continu qu’on frappe, qu’on ouvre, qu’on tonne et qu’on respire ; et ce chant dans les profondeurs du temps restera la houle échappée du poème.


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  • Voilà voilà voilà, la sortie du recueil " il fut un temps...l'ailleurs" est efin officielle, vous pouvez dès à présent vous le procurer via la commande en pré vente avant la sortie officielle le 21 Janvier.

    Je compte sur vous pour le bouche à oreilles et autres moyens de communications pour parler de ce bouquin si jamais il vous touche vraiment :)

     

    Bonne lecture à tous !

     

     

     

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  • Paris, Automne 1992.


    Aux libres penseurs, il ne persiste que la liberté d’avoir été l’objet d’un désir commun.






    Par-delà les vagues de toits – où l’insouciance de tendre leurs mains pour abreuver leur soif tombe de distraction comme tout jeune enfant-, il y a une femme déjà ridée et sans objet comptant, une femme sans histoire, mais qu’on pourrait conter.
    C’est une femme banale – tout en sachant que la recherche de la banalité est en somme d’une originalité sans pareille-, qui ne sait que du goût, le bon vouloir qu’on lui offre lorsque chacun l’achète.
    En face d’elle, se trouve un homme tout aussi commun qu’elle et qui, en se couchant comme tout être sans intérêt, ne compte en lui seul, que la fierté d’avoir vécu.

    Par ailleurs, j’aurais refait sa vie comme celle de tout autre et ce, tout aussi aisément.
    Mais celui qui se penche sur autrui en pensant connaître le monde telle une chose qui lui est ne peut que de son geste lui concéder une part sans âme, fondée sur presque rien.
    Tandis que pour tous ceux qui de leur esprit superficiel, ne faisant preuve que de despotisme, effleurent d’un regarde absolu et nihiliste ces dits « pauvres hommes »dans leur bouche orgueilleuse, il n’y a que celui qui n’a nulle connaissance du complexe, vivant dans l’illogique, qui se verra acteur et maître d’ô combien de luxes, sans demander une scène pour y jouer sa vie.
    D’ailleurs, le monde lui-même est nihiliste si on le restreint à l’homme, on du moins l’image qu’il en émerge. Car tout homme dit « indépendant », il est vrai, vie dans l'illusion du libre arbitre, mais se dire indépendant reviendrait aussi à dire « Je suis ce que je suis », alors qu’en somme, ce qui l’en ressort bien souvent est « Je suis ce que je dois être », d’où la notion de devoir, contre-indiquant toute indépendance morale et physique.
    Mais tu sais, là-bas, en parcourant les rues, On y croise des femmes qui t’accueillent sans visage et qui, du plus éblouissant, du plus profond et fécond des regards, se font soleil d’un souffrant bonheur.
    Tu sais, là-bas, personne ne dit « je suis… »
    C’est comme être l’image d’un homme mettant ses mains sur son visage, ses doigts tels des barreaux, constituant sa cage, et, en daignant la détruire, se briserait chacun d’eux sous peur d’écrire une histoire qui ne lui siérait pas.
    Mais l’idée de ne rien être reste un privilège qu’on ne donne qu’aux pauvres…
    Tu sais, là-bas, en parcourant les rues… là-bas ;

    Par-delà les vagues de toits – où l’insouciance de tendre leurs mains pour abreuver leur soif tombe de distraction comme tout jeune enfant-, il y a des femmes déjà ridées et sans objet comptant, des femmes sans histoire, mais qu’on pourrait conter, et des hommes… qui dansent tous en ronde, qui donnent sans compter, quelques trous dans les poches…



    Des gens qu’on donne, pour en garder le nécessaire, des gens qu’on plaint, qu’on fredonne et qu’on laisse, pour garder bonne conscience, des gens et… et eux comme une chanson dans la tête, et…

    Et l’on offre ses mains, pour tourner d’innocence,
    Et l’on offre ses pieds…
    C’est la chanson du pauvre… qui sonne sur le sol
    Et les misères du riche, qu’on accepte en ses mains…
    Et l’on offre ses mains…
    Pour disparaitre,
    Pour ne plus garder pied…
    Et être riche d’un geste,
    Qui poursuivra demain…


    Des gens, tel un mouchoir au vent, des gens comme un… « Nous avons besoin d’art… ».




    © Damien Corbet - Extrait du recueil " Comme un trou dans la poche" -Tous droits réservés


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